Encore un instant
Les heures jaunes

Bastien Cize

Photographe
Sébastien

Lorsqu'en 2005 j'ai eu la chance qu'un ami m'offre son matériel photo, mes premiers clichés furent des souvenirs de vacances où je m'évertuais à imiter les cartes postales. Mon Canon EOS 500 argentique à la main, je déclenchais alors sans jamais me soucier d'aucun réglage et seul le cadrage m'importait, car je n'imaginais pas qu'un jour je serais attiré par une pratique plus approfondie de la photographie. Pourtant, moins d'un an après, un épisode particulier allait me contredire. C'était une de ces journées banales où mon désœuvrement m'avait amené sur les bords de Loire à Orléans, et tandis que je regardais le défilé des voitures sur le pont Joffre, je sentis un évènement arriver. Un coureur en survêtement rouge apparu sur le pont et allait le traverser, au même moment, deux faisceaux lumineux traversèrent les nuages de chaque côté de l'homme, et l'encadrèrent parfaitement pendant un court instant. J'eus à peine le temps de prendre mon appareil et de déclencher pour fixer la scène, mais je n'avais pas le bon objectif, ni d'ailleurs la bonne technique pour l'immortaliser au mieux. Cela produisit une photo bancale, fade et sans intérêt, mais eu au moins l'avantage de déclencher chez moi l'envie d'apprendre la photo, pour ne plus passer à côté d'instants comme celui dont je venais d'être témoin.

C'est ce jour précis que j'ai décidé d'apprendre à photographier, en lisant de nombreux ouvrages, en cessant d'utiliser les automatismes de mon appareil, mais aussi en notant les réglages de chacune de mes prises de vue. Quand je sortais en balade photographique, j'emportais toujours avec moi un carnet dans lequel je reportais pour chaque photo, l'objectif utilisé, la focale, le type de pellicule, la vitesse, l'ouverture... C'est après deux années de fastidieuses notes que j'ai entrepris d'acquérir un appareil numérique, en l'occurrence, un EOS 400D pour continuer à utiliser mes objectifs. Le passage au numérique n'a pas eu que l'avantage de me faire faire des économies de développement, il m'a surtout permis d'apprendre beaucoup plus vite, puisque désormais je pouvais voir à la volée sur l'écran de l'appareil le rendu de mes réglages, et que ceux-ci étaient directement inscrits dans le fichier.

Aujourd'hui, mon matériel n'est pas des plus récents. Hormis un Canon EOS 6D pour retrouver les plaisirs du plein format, je travaille encore avec mes deux objectifs Canon d'origine: un 28-80mm, et un 70-300mm. J'ai également acquis entre temps un précieux 50mm indispensable à mon avis pour la photo de rue. J'ai conscience que leur qualité n'est plus alignée sur les capteurs numériques d'aujourd'hui, mais je me plais à penser que la force d'une image passe avant tout par sa puissance poétique plutôt que par une course à la définition.

Depuis ce premier jour de révélation donc, je suis à la recherche constante de ces moments d’éternité suspendus, où le fait brut devient une œuvre, où l’image fugace devient un tableau éternel. Dans les jeux de lumière, dans le surgissement de l’évènement, dans les arrangements du hasard, certaines photos se changent en icônes. Une seconde avant, une seconde après, il est trop tôt ou trop tard, la forme se dissout, l’effet est manqué, la réalité redevient banale. Mais une fois sur mille l’éclair jaillit, et l’art avec lui.

Face à la mer

Prochaine exposition

Aucune date prévue pour le moment.


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